Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Mon territoire est cet espace intime qui me permet d’exister aux yeux des autres sans que ne se dévoile ce qu’il m’est important de préserver. Il est mouvant, comme une ouverture de porte à géométrie variable. La parole ne peut pas tout dire, le langage est prolixe car il charrie, comme dans le cours d’une rivière, des limons qui nous sont inconnus.

Mes filtres sont plus ou moins épais, comme ceux de la cigarette sur laquelle on tire  et qui retient plus ou moins de  nicotine, ils me permettent d’avancer dans le territoire des autres avec plus ou moins d’opacité.

Sentir que mon territoire peut toucher le territoire de l’autre est un bonheur rare, il est fonction du ressenti et du désir d’être en lien avec quelques autres.

 Le langage ouvre des territoires inconnus et merveilleux et l’écriture  fait partie de ce territoire.

Apprendre des autres me permet d’ouvrir certaines vannes et d’être comme dans la baie du Mont Saint Michel, découverte ou recouverte selon les moments

Mais, ce que je défends bec et ongles, comme dit Sybille, c’est à la fois très clair et très obscur. Très clair quand je sens qu’il me faut préserver, pour moi comme pour l’autre, cet espace pour respirer et  donner aux autres ce que je peux sans pour autant les agresser. Obscur lorsque avec un alter-ego, je sens que j’arrive à partager un espace profond  que ni moi, ni l’autre ne maîtrisons. La limite est labile car s’avancer peut enrichir ou bien ensevelir.

Il me paraît très riche d’écrire sur ce thème car c’est le terreau qui assied mon rapport aux autres.

L’écriture est une chance pour celui qui pratique, comme nous le faisons ici, l’écriture de soi. Car transpire à chaque ligne ce qui fait que nous sommes chacun uniques et fragiles.

L’écriture est un grand plus car nous écrivons au-delà de ce que nous disons oralement.

Comme les écrivains dont on peut dire, c’est du Duras, du Aron, du Camus, nous écrivons tous avec ce que nous sommes. Je sens bien en l’écrivant que ce -ce que nous sommes- est souterrain et inconnu pour moi comme pour l’autre, mais quand Sybille dit -c’est bien toi-, c’est qu’elle perçoit quelque chose de la singularité de chacun.

L’écriture me permet de laisser sur le papier des traces avec plus ou moins d’opportunité.

Pourquoi certains textes me paraissent-ils moyens, voire à refaire quand d’autres y trouvent un intérêt? Lorsque j’écris, j’accepte, comme un postulat, de perdre la maîtrise.

L’expérience de l’écriture m’apprend tous les jours un peu plus et je vois mieux l’intérêt de partager cette écriture avec d’autres car elle dit et ne dit pas ce qui affleure des zones de turbulence.

S’avancer dans ce que je ne sais pas encore est une aubaine pour perdre certaines inhibitions que la peur a édifié comme une forteresse qui a besoin de douves et d’un pont-levis pour se protéger. L’écriture contacte quelque chose de mon être, et me permet de perdre un peu plus de certitudes sans pour autant me perdre dans ce dédale.

Nul n’écrit comme il parle, l’écriture a besoin de contraintes pour être lu et entendu.

Véronique Kangizer                    

 

Tag(s) : #Véronique M., #Territoires, #stages d'écriture
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :